Les biais sociaux
26/04/2014
Les diverses études qui se sont intéressées à l'incidence des émotions sur la prise des décisions ont montré qu'une intelligence émotionnelle élevée permet de diminuer les biais comportementaux.
Néanmoins, la même dimension émotionnelle peut avoir une influence multiple (positive ou négative) sur les mécanismes de décision. En 2005, Greenwich propose une classification selon deux critères: émotionnel / cognitif et individuel / collectif, dont il résulte quatre catégories de biais. Le biais cognitif individuel (ce qui est arrivé était inévitable et prévisible), le biais cognitif collectif (le conformisme collectif ou les croyances communes), le biais émotionnel individuel (la sur confiance des dirigeants, l'addiction, la peur, la cupidité, l'aversion liée aux pertes et aux regrets, la pensée magique, l'optimisme, l'orgueil), le biais émotionnel collectif (l'effet de panique, la pression des pairs). Le courant issu de l'économie et de la gestion considère que les émotions sont néfastes et qu'elles sont susceptibles d'induire des biais sur les décisions. Mais depuis une quinzaine d'années un autre courant se développe à partir de la découverte que le traitement émotionnel de l'information précède le traitement cognitif (Damasio, 1994). Dans ce contexte, l'intelligence émotionnelle représente un champ d'application très large dans le domaine du management: elle devrait avoir une incidence positive sur le leadership, sur la gestion du changement, sur l'adaptation professionnelle, sur la gestion des équipes, et on sait maintenant mesurer son effet sur la performance au travail, et sur le degré de satisfaction des cadres et des employés.
Le site brainpickings.org présente un ouvrage récent qui nous invite à un voyage dans notre cerveau caché, celui qui est responsable de nos décisions les plus importantes, vues comme le résultat de biais sociaux inconscients. Son auteur, Shankar Vedantam, ancien éditorialiste au Washington Post, au Département du comportement humain, explique comment nos préjugés les plus imperceptibles se glissent à travers notre moi conscient, en menant à des erreurs cognitives subtiles, qui se situent en deçà de la lisière de notre conscience. Nos actions et nos intentions se trouvent souvent en désaccord, et cela va des erreurs financières basées sur des jugements inadéquats, au vote manipulé, ou aux conflits entre des peuples, des nations, des groupes.
Vedantam observe que si les biais inconscients ont toujours existé, aujourd'hui de multiples facteurs font qu'ils soient dangereux. La globalisation et les technologies, l'extrémisme religieux, le bouleversement économique, le changement démographique, la migration des populations ont amplifié les effets des biais cachés. Hier, nos erreurs mentales pouvaient nous affecter nous-mêmes et notre entourage, aujourd'hui ils affectent des peuples vivant dans des territoires lointains, et aussi des générations qui ne sont pas encore nées. L'exemple du papillon qui peut provoquer un tremblement à l'autre bout du monde était une construction théorique. De nos jours, des biais subtiles qui se produisent dans des esprits éloignés de nous peuvent provoquer des tempêtes réelles dans nos propres vies. Les gens extraordinaires ne le sont pas parce qu'ils seraient invulnérables aux biais inconscients, mais parce qu'ils choisissent de faire quelque chose contre cela. Les biais inconscients influencent nos vies à la manière des courants sous marins qui nous entraînent. Et même lorsque ceux-ci nous aident, nous sommes toujours inconscients de leur rôle, nous ne leur faisons jamais crédit, mais nous nous faisons crédit à nous-mêmes, à nos talents, à nos compétences. Si nous arrivons au succès par des moyens corrompus, nous savons bien que nous sommes là parce que nous avons triché. Ce sont les biais explicites. Mais lorsque nous arrivons au succès grâce à des privilèges inconscients, nous n'avons pas l'impression d'avoir triché. Les gens qui luttent contre le courant toute leur vie donnent de fausses explications pour les résultats: s'ils tombent à côté, ils se blâment eux-mêmes. C'est comme s'il existait toujours des explications plausibles pour les gens qui réussissent, et toujours des explications plausibles pour les gens qui ne réussissent pas. On peut toujours attribuer l'échec à l'absence de persévérance, ou de prévoyance, ou de compétence. C'est comme une énigme bouddhiste: si vous ne changez jamais de direction, comment pouvez-vous dire que là, il y a un courant?
L'explication que nous propose The Hidden Brain n'est pas une accusation, mais une compréhension pleine de compassion qui nous invite à devenir meilleurs en changeant notre esprit vers plus de sincérité, de conscience de soi, d'intégration de nos actions et de nos intentions.
2 commentaires
J'aimerais bien discuter avec toi de cet article.
Dès que je peux je te téléphone.
A très vite. Je t'embrasse.
MC.
Avec joie, Marie-Claude, je t'embrasse, à très bientôt.
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