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La fiction comme thérapie
(Photos Nice- Le jardin Alsace-Lorraine en juin)
La lecture peut être une thérapie pour gérer les défis émotionnels de l’existence. Les neurosciences ont trouvé que dans notre cerveau les mêmes réseaux s’activent quand nous lisons des récits et quand nous essayons de deviner les émotions d’une autre personne. Nos habitudes de lecture changent au fur et à mesure des étapes que nous traversons dans notre vie. Pour certaines personnes, lire de la fiction est simplement essentielle à leur vie. A une époque séculière comme la nôtre, lire de la fiction reste l’une des rares voies vers la transcendance, si l’on comprend par ce terme l’état insaisissable dans lequel la distance entre le moi et l’univers se rétrécit. Lire de la fiction peut nous faire perdre tout sens de l’ego, et en même temps, nous faire nous sentir pleinement nous-mêmes. Comme écrit Woolf, un livre nous divise en deux pendant que nous lisons, parce que l’état de lecture consiste en une totale élimination de l’ego, et qu’il nous promet une union perpétuelle avec un autre esprit.
La bibliothérapie est un terme qui désigne l’ancienne pratique consistant à encourager la lecture pour ses effets thérapeutiques. Sa première utilisation date de 1916, dans un article paru dans « The Atlantic Monthly » sous le titre « A Literary Clinic ». L’auteur y décrit un institut où l’on dispense des recommandations de lecture à valeur de guérison. Un livre peut être un stimulant ou un sédatif, un irritant ou un somnifère. Il a un effet certain sur nous, et nous devons savoir lequel. Nous choisissons nos lectures : des récits agréables qui nous font oublier, ou des romans qui nous sollicitent ou nous déstabilisent.
La bibliothérapie prend aujourd'hui des formes diverses et variées : des cours de littérature pour la population carcérale, des cercles pour personnes âgées ou atteintes de démence sénile. Il existe une bibliothérapie « émotionnelle », parce que la fiction a une vertu restauratrice. On peut prescrire des romans pour différentes affections, telles le chagrin d’amour, ou l’incertitude dans la carrière. En 2007, The School of Life a été créée avec une clinique de bibliothérapie, la fiction étant vue comme une cure suprême parce qu’elle offre aux lecteurs une expérience transformationnelle.
En fait, on retrouve la méthode chez les Grecs anciens qui avaient inscrit au-dessus de l’entrée de la bibliothèque de Thèbes que là, c’était un lieu pour la guérison de l’âme. La pratique s’est installée à la fin du XIXe siècle, quand Freud avait commencé à utiliser la littérature dans ses séances de psychanalyse. Après la Première Guerre, on prescrivait souvent un cours de lecture aux soldats traumatisés qui revenaient du front. Plus tard, et plus récemment, la bibliothérapie est utilisée par les psychologues, les travailleurs sociaux, les médecins, les gérontologues, comme un mode de thérapie viable. A présent, il existe un réseau international de bibliothérapeutes formés et affiliés à « School of Life ».
Les affections les plus fréquentes que manifestent les gens relèvent des moments de transition d’une étape à une autre dans leur vie : se sentir bloqué dans son parcours professionnel, ou déprimé dans une relation, ou faire face à un deuil. Les bibliothérapeutes voient beaucoup de retraités qui ont encore une bonne vingtaine d’années de lecture devant eux, mais qui n’ont peut-être lu que des thrillers, et qui ont besoin de quelque chose de nouveau qui les puisse les soutenir, les nourrir.
Tous les lecteurs passionnés qui se sont soignés eux-mêmes avec de grands livres pendant toute leur vie savent que lire des récits est bon pour la santé mentale, pour les relations avec les autres. Mais de nos jours, cela est devenu encore plus clair grâce aux récentes recherches mettant en évidence les effets de la lecture sur le cerveau. La neuroscience de l’empathie doit beaucoup à la découverte des « neurones miroirs », au milieu des années ’90. Une étude publiée dans « Annual Review of Psychology », en 2011, basée sur l’examen des IRM du cerveau des participants, a montré que lorsque nous lisons une expérience, les mêmes régions neurologiques sont stimulées que lorsque nous effectuons nous-mêmes cette expérience. D'autres études publiées en 2006 et 2009 ont montré quelque chose de similaire –les gens qui lisent beaucoup de fiction ont tendance à être mieux en empathie avec les autres (le biais principal serait que les gens les plus empathiques ont tendance à lire des romans). En 2013, une étude importante publiée dans « Science » a trouvé que lire de la fiction littéraire (plutôt que de la fiction populaire ou de la fiction non littéraire) améliorait les résultats des participants aux tests mesurant la perception sociale et l’empathie, et qui sont essentiels dans la « théorie de l’esprit ». La capacité à deviner avec précision ce qu’un autre être humain pourrait penser ou ressentir est une compétence que les humains commencent à développer à partir de l’âge de 4 ans. Keith Oatley, romancier et professeur de psychologie cognitive à l’Université de Toronto, a dirigé pendant des années un groupe de recherche intéressé dans la psychologie de la fiction. Il écrit dans son livre paru en 2011, « Such Stuff of Dreams : The Psychology of Fiction » que la fiction est une sorte de simulation qui a lieu non dans l’ordinateur, mais dans le cerveau : une simulation des egos en interaction avec d’autres dans le monde social, basée sur l’expérience et impliquant la capacité de réfléchir à des futurs possibles. L’idée que les livres sont les meilleurs amis est une conviction de beaucoup d’écrivains et de lecteurs. En tant qu’amis, les livres nous offrent la chance de répéter les interactions avec les autres dans le monde, mais sans les dégâts durables. Proust l'avait remarqué: avec les livres, il n’y a pas de sociabilité obligatoire.
Néanmoins, tout le monde ne partage pas l’idée que la fiction nous procure la capacité d’être meilleurs dans la vie réelle. Dans son livre paru en 2007, «Empathy and the Novel », Suzanne Keen se penche sur l’hypothèse de l’empathie-altruisme, en étant sceptique que les connections empathiques créées pendant la lecture fiction se traduisent réellement en un comportement altruiste, prosocial, dans le monde. Elle montre qu’une telle hypothèse est difficile à prouver. «Les livres ne peuvent pas opérer des changements par eux-mêmes. Comme tout rat de bibliothèque sait bien, les lecteurs peuvent être antisociaux et indolents. Lire des romans n’est pas un sport d’équipe». Mais nous devrions apprécier ce que la fiction nous offre, c’est-à-dire une libération de l’obligation sociale de ressentir quelque chose à l’égard des personnages inventés, ce qui signifie que paradoxalement les lecteurs répondent parfois avec une plus grande empathie à une situation et à des personnages qui ne sont pas réels, à cause du caractère protecteur de la fiction. Celle-ci soutient le bénéfice personnel d’une expérience d’immersion dans la lecture, qui permet d’échapper à la pression quotidienne. Donc, même si nous ne sommes pas d’accord que lire de la fiction nous fait mieux traiter les autres, au moins nous devons reconnaître que c’est une manière de mieux nous traiter nous-mêmes. Il a été démontré que lire met notre cerveau dans un état semblable à la transe, à la méditation, et que cela apporte les mêmes bénéfices pour la santé que la relaxation ou la paix intérieure. Les lecteurs réguliers ont un meilleur sommeil, moins de stress, une plus grande estime de soi, et enregistrent moins d’épisodes dépressifs que les non-lecteurs. «La fiction et la poésie sont des médicaments –écrit l’auteur Jeanette Winterson. Ils guérissent la rupture que la réalité produit sur l’imagination». On n’a jamais autant publié de livres que de nos jours, mais les gens choisissent dans un réservoir de plus en plus réduit, et ils sont plus sélectifs.
14/06/2015 | Lien permanent
Schopenhauer, notre contemporain
La plupart des hommes parlent sans avoir eu le temps de réfléchir, et même s’ils constatent par la suite que ce qu’ils affirment est faux et qu’ils ont tort, ils s’efforcent de laisser paraître le contraire.
Et pourquoi cela ? Eh bien, nous dit Schopenhauer, à cause de la nature mauvaise du genre humain, de notre vanité innée, surtout en matière de facultés intellectuelles. Nous n’acceptons pas que notre raisonnement se révèle faux. Il faudrait que chacun puisse émettre des jugements justes et qu’il réfléchisse avant de parler. Mais chacun possède sa dialectique naturelle, tout comme il a sa logique naturelle. Un homme sera rarement dépourvu de logique naturelle, mais pas de dialectique naturelle : il s’agit là d’un don bien mal réparti (…). La logique n’est pas d’une grande utilité pratique, tandis que la dialectique est essentielle, puisque la logique s’intéresse à la forme des énoncés (l’étude du général), et la dialectique à leur fond, c’est-à-dire à leur contenu ou à leur substance (l’étude du particulier). D'ailleurs, observe Schopenhauer, il arrive souvent qu’on se laisse abuser par une argumentation, alors même qu’on a raison. Souvent, celui qui sort vainqueur d’un débat ne le doit pas tant à la justesse de son jugement dans l’articulation de sa thèse, mais plutôt à sa ruse et à son habileté à la défendre.
Schopenhauer rappelle que, pour Aristote, nos énoncés sont perçus différemment, selon la perspective adoptée : dans une perspective philosophique, on cherche la vérité, dans une perspective dialectique, on cherche l’opinion et l’approbation d’autrui. Dans L’art d’avoir toujours raison, le philosophe se livre à une réflexion sur le langage et la dialectique et analyse les stratagèmes pour sortir vainqueur de tout débat ou dispute. En voici un exemple.
Stratagème 1. Ou l’extension. ll s’agit de pousser l’affirmation adverse au-delà de ses frontières naturelles, en l’interprétant de la manière la plus générale possible, en la prenant au sens le plus large possible, en la caricaturant ; tout en restreignant le sens de la sienne au maximum, en la délimitant au plus serré : de fait, plus une affirmation est générale, plus elle prêtera le flanc aux attaques. (…) Exemple 1. Je dis : « Dans le domaine dramatique, les Anglais se classent au premier rang des nations. » L’adversaire tente un contre-exemple : « Il est de notoriété publique qu’ils ne valent pas grand-chose en musique, et donc en opéra. » Je coupe court, rappelant que « le terme dramatique ne recouvre pas le champ musical, mais uniquement la tragédie et la comédie. » Ce dont il avait bien évidemment tout à fait conscience, essayant simplement de généraliser mon affirmation de telle sorte qu’elle vienne s’appliquer à tout type de représentation scénique, et donc à l’opéra, et donc à la musique, avant de pouvoir m’infliger le coupe de grâce. (…)
Dans ce livre, vous trouverez 38 stratagèmes précieux et sarcastiques, avec leurs exemples, l’ultime stratagème étant celui-ci : Si on constate que l’adversaire nous est supérieur, et qu’on ne pourra pas avoir raison, on s’en prendra à sa personne par des attaques grossières et blessantes. L’attaque personnelle consiste à se détourner de l’objet du débat (dès lors que la partie semble perdue) pour s’en prendre à la personne du débatteur. (…) L’attaque personnelle, elle, abandonne totalement le fond, pour ne cibler que la personne de l’adversaire : notre propos se fera alors blessant, hargneux, insultant, grossier. Toutefois, observe Schopenhauer, ce ne sont pas les paroles grossières et blessantes qui accableront le plus l’adversaire. Puisque rien n’est plus important à l’homme que la satisfaction de sa vanité, nulle blessure n’est plus douloureuse que celle qui est infligée à sa vanité. Or, la vanité se nourrit principalement de la comparaison avec autrui, ce qui est valable dans tout contexte, mais surtout lorsqu'on touche aux facultés intellectuelles. C’est pourquoi la solution la plus sûre est celle que formule Aristote dans ses Topiques : ne pas débattre avec le premier venu, mais uniquement avec des gens que l’on connaît et dont on sait qu’ils ont assez d’entendement pour ne pas débiter trop de stupidités, qui vont faire appel à la raison et non à des citations, qui seront capables d’entendre un argument rationnel et y souscrire, qui respectent la vérité et qui prennent plaisir à entendre un argument fondé, même de la bouche de l’adversaire, qui ont assez d’honnêteté intellectuelle pour reconnaître avoir tort si la vérité est dans l’autre camp.
La friction intellectuelle qu’est le débat crée les conditions d’un profit mutuel aux esprits qu’il confronte, leur permettant de rectifier leur propre pensée, et d’ouvrir des perspectives nouvelles. Mais les deux débatteurs doivent être au même niveau culturellement et intellectuellement.
Nous parlerions aujourd'hui de dissonance cognitive, de théories du complot, de fake news.
Mais regardons ce que le philosophe dit sur la lecture, les livres, les penseurs personnels, avec son style incisif, littéraire, et son pessimisme qui avait imprégné toute la moitié du XIX e siècle, jusqu'à Nietzsche et Freud.
L’ignorance ne dégrade l’homme que lorsqu'on la trouve accompagnée de la richesse. Le pauvre est accablé sous sa détresse ; son travail prend la place du savoir et occupe ses pensées ; par contre, les riches qui sont ignorants vivent uniquement pour leurs plaisirs et ressemblent aux bêtes : on constate cela chaque jour.
Quand nous lisons, nous suivons le processus mental de celui qui a écrit. C’est-à-dire, nous ne faisons pas le travail de la pensée, en tout cas, pour la plus grande partie. Celui qui lit beaucoup et presque toute la journée, dit le philosophe, perd peu à peu la faculté de penser par lui-même, ce qui est le cas d’un grand nombre d’hommes instruits : ils ont lu jusqu'à s’abêtir. Un excès de nourriture intellectuelle peut surcharger et étouffer l’esprit. Car, plus on lit, et moins ce qu’on a lu laisse de traces dans l’esprit… (…) on n’arrive pas à ruminer ; mais ce n’est qu’en ruminant qu’on assimile ce qu’on a lu.
Nous ne pouvons acquérir, par la lecture des écrivains, aucune des qualités qu’ils possèdent: par exemple, force de persuasion, richesse d’images, don des comparaisons, hardiesse ou amertume, brièveté, grâce, légèreté d’expression, ou esprit, contrastes surprenants, laconisme, naïveté, etc. Mais si nous sommes déjà doués de ces qualités, c’est-à-dire si nous les possédons potentiâ, nous pouvons par- là les faire éclore en nous, les amener à la conscience (…)
Voici un extrait tellement actuel :
Il n’en est pas autrement en littérature que dans la vie : de quelque côté qu’on se tourne, on se heurte aussitôt à l’incorrigible populace de l’humanité. Elle existe partout par légions, remplissant tout, salissant tout, comme les mouches en été. De là, la quantité innombrable de mauvais livres, cette ivraie parasite de la littérature, qui enlève sa nourriture au froment, et l’étouffe. Ils accaparent le temps, l’argent et l’attention du public, qui appartiennent de droit aux bons livres et à leur noble destination, tandis qu’eux ne sont écrits qu’en vue de grossir la bourse ou de procurer des places. Ils ne sont donc pas seulement inutiles, ils sont positivement nuisibles. (…) Auteurs, éditeurs et critiques on fait un pacte sérieux à ce sujet.
En fait, ce qui a motivé cette note, a été le dernier prix Nobel de littérature (2022) - un auteur qui m’était inconnu (ou, si vous préférez, une autrice/auteure). L’auteur en question est français, mais il aurait pu être sud-américain, ou autre, tout aussi inconnu. Car, dit Schopenhauer, l’art de ne pas lire est des plus importants. Il consiste à ne pas prendre en main ce qui de tout temps occupe le grand public (…). Rappelez-vous plutôt, en cette occasion, que celui qui écrit pour des fous trouve de tout temps un public étendu ; et le temps toujours strictement mesuré qui est destiné à la lecture, accordez-le exclusivement aux œuvres des grands esprits de toutes les époques et de tous les pays, que la voix de la renommée désigne comme tels, et qui s’élèvent au-dessus du restant de l’humanité. Ceux-là seuls forment et instruisent réellement. Pour lire le bon, il y a une condition : c’est de ne pas lire le mauvais. Car la vie est courte, et le temps et les forces sont limités. [J’ai suscité certaines réactions sur Facebook en avouant que je ne connaissais pas l'écrivain nobélisé cette année "pour sa littérature engagée", comme écrit le journal Libération, et que je n’avais pas la curiosité de le découvrir, après m’être renseignée un minimum sur son univers et ses valeurs].
Les mauvais livres sont un poison intellectuel ; ils détruisent l’esprit. Parce que les gens, au lieu de lire ce qu’il y a de meilleur dans toutes les époques, ne lisent que les dernières nouveautés, les écrivains restent dans le cercle étroit des idées en circulation, et l’époque s’embourbe toujours plus profondément dans sa propre fange.
Schopenhauer remarque que l’effet exercé sur l’esprit d’une part par la pensée personnelle, d'autre part par la lecture, est très différent. Dans la lecture, l’esprit est contraint du dehors et les idées lues lui sont étrangères et hétérogènes, tandis que dans la pensée personnelle, au contraire, l’esprit suit sa propre impulsion, telle qu’elle est déterminée pour le moment ou par les circonstances extérieures, ou par quelque souvenir. Les circonstances perceptibles impriment dans l’esprit non une simple pensée définie, comme fait la lecture, mais lui donnent purement la matière et l’occasion de penser ce qui est conforme à sa nature et à sa disposition présente. En conséquence, lire beaucoup enlève à l’esprit toute élasticité, comme un poids qui pèse constamment sur un ressort ; et le plus sûr moyen de n’avoir aucune idée en propre, c’est de prendre un livre en main dès qu’on dispose d’une seule minute.
L’opinion du philosophe est que par la lecture nous accédons aux pensées des autres, et que seules nos pensées fondamentales personnelles ont vérité et vie, la lecture étant un succédané de la pensée personnelle. Or, chasser ses pensées originales pour prendre un livre en main, c’est un péché contre le Saint-Esprit. On ressemble alors à un homme qui fuirait la vraie nature pour regarder un herbier ou examiner de belles régions en gravure. Néanmoins, si, à force de travail, de méditation et de réflexion, nous découvrons une vérité que nous aurions pu trouver toute prête dans un livre, cette vérité obtient par la pensée personnelle cent fois plus de valeur. Elle pénètre alors comme partie intégrante, comme un membre vivant, dans tout notre système pensant.
En termes actuels, nous parlerions du pouvoir de la réflexion, qui est un processus personnel basé sur notre capacité de discernement, mais également sur notre vécu, sur nos expériences. Dans le même temps, la simple expérience ne peut remplacer la pensée, pas plus que la lecture. La vérité simplement apprise n’adhère à nous que comme un membre artificiel, une fausse dent, un nez en cire (…). Mais la vérité acquise par notre propre penser est semblable au membre naturel ; elle seule nous appartient réellement.
Schopenhauer conclut que ce monde n’est pas peuplé de pensants véritables, car si la nature avait destiné l’homme à penser, elle ne lui aurait pas donné d’oreilles, pour entendre les bruits illimités de toute espèce. Mais l’homme est en réalité un pauvre animal semblable aux autres, dont les forces sont calculées en vue du maintien de son existence. Aussi doit-il tenir constamment ouvertes ses oreilles, qui lui annoncent d’elles-mêmes, la nuit comme le jour, l’approche de l’ennemi.
Référence
Arthur Schopenhauer, L’Art d’avoir toujours raison. La lecture et les Livres. Penseurs personnels.
Librio, 2021
01/11/2022 | Lien permanent
Lisez Shakespeare..
"Si vous voulez savoir ce qu'est l'hystéro-neurasthénie, par exemple, ne lisez pas un traité de psychiatrie; lisez Hamlet. Si vous voulez savoir ce qu'est la démence terminale ne lisez pas un traité de psychiatrie; lisez Le Roi Lear " -écrit Fernando Pessoa. Il est incontestable que la littérature reste le meilleur moyen de comprendre les comportements humains, les émotions, les sentiments. Pessoa a entretenu un rapport affectif avec le genre policier, qui est souvent considéré comme un genre paralittéraire, mineur, ou "populaire". Il était persuadé que "l'un des rares divertissements intellectuels qui restent encore à ce qui demeure d'intellectuel dans l'humanité est la lecture de romans policiers", et pendant des décennies, il a écrit des textes inédits, "un par mois" jusqu'à sa mort. Son personnage, Quaresma, est aussi bien un maître de la déduction qu'un connaisseur du fonctionnement de l'âme humaine. Voici l'explication qu'il donne du suicide vu comme un acte de panique :
29/05/2014 | Lien permanent
La pensée autonome (2)
07/09/2013 | Lien permanent
Le bonheur (2)
La recherche actuelle sur le sens et la quête du bonheur montre que nous courons peut-être le risque de saper notre réel bien-être. Plus les gens veulent à tout prix être heureux, moins ils le sont, ou plus ils dépriment. Nous avons tendance à supprimer toute émotion négative, mais si nous supprimons une émotion, il faudrait les supprimer toutes. Notre cerveau fait face à la surcharge émotionnelle en opérant la dissociation (au niveau neurologique, nous "refroidissons" nos réponses émotionnelles), ce qui nous permet de gérer les moments difficiles (comme le ferait un guerrier en terrain hostile). Néanmoins, il faut reconnaître que fonctionner en mode de survie a un coût élevé.. Dans une quête du bonheur, nous rejetons les émotions négatives, et parfois, il nous arrive de nous en vouloir parce que nous nous sentons moins heureux que nous devrions.
Selon la pensée bouddhiste, la cause de la tristesse se trouve dans la discordance entre l'attente et la réalité. Or, si nous rejetons le réel, avec les si nécessaires émotions d'inquiétude et de mécontentement, nous ne faisons qu'augmenter notre tristesse, en nous efforçant en vain de remplacer le réel par l'agréable. C'est un piège fréquent. Normalement, nous devrions nous sentir heureux, nous essayons de l'être, et nous refusons les émotions qui nous semblent contraires, en supprimant ce qui est inconfortable. A cause de ce favoritisme émotionnel, on a du mal à avancer. Les émotions signalent l'opportunité ou la menace, et c'est grâce à elles que nous trouvons des solutions à nos problèmes. A la même manière dont nous utilisons des données mathématiques pour résoudre des problèmes mathématiques, nous utilisons des données émotionnelles pour résoudre des problèmes émotionnels. En maths, nous n'utilisons pas que les nombres pairs. Si nous rejetons et dévaluons la tristesse, par exemple, nous perdons des données qui pourraient nous aider à trouver un bonheur plus profond et plus durable.
19/11/2013 | Lien permanent
Les thérapies brèves (II) L'approche narrative
(Photo-Bonne année 2017!)
La thérapie narrative, qui fait partie des thérapies brèves de troisième vague, est une approche ouverte initialement développée par des travailleurs sociaux et des thérapeutes (les co-créateurs de l'approche narrative sont Michael White et David Epston). La thérapie narrative est devenue « pratiques narratives » au fur et à mesure qu’elle investissait de nouveaux champs d’action tels que le coaching en entreprise. Selon Michael White, le travail thérapeutique consiste essentiellement à redévelopper des narrations personnelles et à reconstruire l'identité. Le principe de l’approche narrative est de découvrir quelles sont les histoires qui nous constituent et de dégager celle qui domine et nous retient prisonniers dans un schéma comportemental. Ces histoires donnent du sens à ce que nous vivons. Nous les construisons à partir de nos croyances, qui proviennent de notre culture, famille, éducation, religion, et elles sont déterminantes dans notre comportement face aux difficultés et aux choix que nous faisons.
La thérapie narrative tient compte de la réalité culturelle, historique et sociale de chaque personne. La tâche du thérapeute n’est pas de trouver une solution ou de comprendre les systèmes, mais plutôt de poser des questions pour aider les personnes à observer l’influence de certaines histoires culturelles restrictives et à enrichir leur propre histoire de vie. L’important n’est pas de résoudre le problème mais d’identifier ou de modifier les histoires qui maintiennent le problème, et de construire de nouvelles histoires qui créent de nouvelles possibilités de vie. L’approche narrative considère que notre histoire n’est pas un compte-rendu de notre vie, mais à l’inverse, que ce sont nos récits sur notre expérience qui donnent forme à notre vie et à notre identité. L’approche narrative est connue pour ses conversations de « re-storying » (redevenir l’auteur de sa vie, réécrire sa vie). Pour les praticiens narratifs, les histoires consistent en événements reliés en séquences à travers le temps par un thème.
Nous cherchons à donner du sens à nos expériences quotidiennes. Nous créons les récits de nos vies, en reliant des événements entre eux, dans une séquence de temps spécifique, et en trouvant une façon de les expliquer, de leur donner du sens. Cette recherche de sens fournit le thème de l’histoire. Nous n’arrêtons jamais dans la vie de générer du sens. Une histoire, c’est comme un fil qui tisse les événements entre eux pour former un récit. Chacun de nous dispose, pour décrire sa vie et ses relations, de nombreuses histoires qui vivent en parallèle, par exemple, des histoires sur nos aptitudes, nos batailles, nos compétences, nos initiatives, nos désirs, nos relations, notre travail, nos centres d’intérêt, nos victoires, nos réalisations, nos échecs. Nous les avons développées en reliant certaines de nos expériences de vie dans une séquence et en leur attribuant du sens. Notre histoire dominante influence nos actes dans le présent, elle a aussi des répercussions sur nos faits et gestes à venir. Les significations que nous donnons aux événements ne sont pas neutres sur leurs conséquences et sur notre vie, elles fondent et elles façonnent notre vie future. Plusieurs histoires vivent en parallèle, nos vies sont multi-histoires et elles sont inscrites dans un contexte social élargi, lequel influe sur les interprétations et les significations que nous attribuons aux événements.
En approche narrative, on pense en termes d’histoires dominantes et d’histoires alternatives, de thèmes dominants et de thèmes alternatifs. Avec l'aide du thérapeute, les personnes explorent les histoires qu’elles racontent sur leur vie et sur leurs relations, les effets de ces histoires, leurs significations et le contexte dans lequel elles ont été forgées et écrites.
Quelques postulats des pratiques narratives : le problème est le problème (la personne n’est pas le problème) ; les gens sont experts de leur propre vie ; chacun peut redevenir l’auteur de ses histoires de vie ; quand une personne vient voir le spécialiste, elle a déjà tenté des tas de choses pour diminuer l’influence du problème sur sa vie et sur ses relations ; les problèmes évoluent dans des contextes culturels générant des relations de pouvoir fondées sur des considérations de race, de classe sociale, de préférence sexuelle, de genre et de handicap.
(Références: les sites actuels sur les pratiques narratives)
En 2017, CEFRO propose une Activité Erasmus+ autour des techniques et des pratiques narratives. Ce domaine correspond à l’une de nos expertises (sciences humaines/éducation), et à des travaux de recherche antérieurs portant sur le discours narratif et sur la structuration du Sujet en tant que personne (DEA et Doctorat français de littérature).
CEFRO pourrait apporter du conseil basé sur l’approche narrative aux personnes intéressées (entretiens individuels) et aux entreprises (intervention).
04/01/2017 | Lien permanent
Le Sujet aimant
Bonne Année 2019!
« Le cerveau humain n’a pas été fait pour être heureux, mais pour apprendre. C’est pourquoi l’expérience d’un apprentissage réussi fournit la plus grande quantité d’hormones responsables du bonheur. » (Viktor Frankl)
Dans un entretien accordé à la revue Psychologies (Juillet-Août 2016), le généticien Axel Kahn formule autrement la même idée : Nous n’avons pas de capacité génétique au bonheur. On naît avec un génome humain, on est biologiquement humain, c’est une caractéristique innée. Mais la plus grande de nos propriétés innées dont nous avons hérité avec ce génome, c’est celle d’acquérir, d’apprendre. Etre humain pleinement, c’est donc épanouir, autant qu’on le peut, cette fantastique aptitude au contact des autres humains. La capacité d’apprentissage est présente chez les animaux non humains aussi, mais beaucoup plus limitée. Pour édifier un psychisme humain, l’autre est indispensable. Nous avons tous la capacité à reconnaître la profonde réciprocité entre l’autre et nous, et cela fait le caractère universel de l’aptitude à la pensée morale. Mais c’est toujours le principe de réciprocité qui peut nous entraîner à ne pas être bienveillant, à être injuste, à nier l’autonomie de l’autre. Dès lors, être humain pleinement introduit l’autre comme l’une des finalités de l’existence, on peut dire sa seule finalité incontestable.
Selon le généticien, l’idée du développement personnel est le pire des égotismes modernes. Si nous nous enrichissons mais nous ne voulons rien faire de ces richesses, si nous ne les partageons pas, nous les perdons. Une richesse intérieure qui n’est pas partagée ne sert à rien. Celui qui la possède ne peut pas en profiter pleinement. Nous vivons dans une société qui focalise tout sur l’injonction de nous épanouir par nos propres moyens. Chacun devient maître de son destin, n’est lié à l’autre que par les contrats qu’il peut être amené à passer avec lui, rien de plus. L’injonction à mener un destin individuel amène à un échec obligatoire, à une frustration. Depuis la nuit des temps, d'ailleurs, il n’y a pas un seul poète, un seul romancier, un seul philosophe, un seul psy, à considérer que le bonheur soit accessible sans l’autre. Bien entendu, ce n’est pas le cas de toutes les démarches de développement personnel, qui peuvent être tournées vers autrui, ni celui des auteurs engagés dans une recherche spirituelle, qui entendent se développer de différentes manières, par la méditation ou la spiritualité, pour avoir plus à apporter aux autres.
Nous n’avons pas de capacité génétique au bonheur, nous avons une capacité génétique à être humain. Cela nous fait préférer le bien-être au mal être, la sérénité au stress. Dès lors, si être bons, généreux, nous était désagréable, nous ne le serions tout simplement pas. Même l’altérité la plus empathique exige qu’on en éprouve une certaine forme de plaisir. Le substratum de bonheur est en partie obligatoire à toute forme d’action. Dans une définition à valeur générale, le bonheur est l’adéquation entre le ressenti et l’aspiration. Autrement dit, si les saints avaient horreur d’être saints, ils ne le seraient pas.
Voici plus loin: trois notes antérieures sur le rôle de la mémoire dans notre relation à l’autre et dans notre recherche du bonheur, et sur le récit, comme l’une des formes les plus universelles et les plus puissantes du discours et de la communication humaine (La mémoire et le regret ; La mémoire ; Les bons récits); en PDF mon texte Le Sujet aimant au Moyen Age. (Les attitudes amoureuses illustrées dans la littérature courtoise ne sont que l'illustration de l'effet que l'amour peut avoir sur les comportements, dans ce sens qu'il exprime la construction de l'être humain, la structuration du Sujet aimant. Situer l'amour courtois au niveau du langage revient à éclairer la psyché médiévale dans la perspective de la structure psychologique de l'être humain.)
Photos: 1. La revue Trames,1995. 2. L'illustration Christine de Pisan donnant une leçon à quatre hommes, XVe siècle, dans mon Carnet d'adresses des Dames du temps jadis (1995)
01/01/2019 | Lien permanent
Angoisse et défense
(Photo- à Nice, le 1er avril)
La psychologie (la thérapie) existentielle s’occupe d’un certain type de conflit qui survient lorsque l’individu prend conscience des enjeux ultimes de l’existence : la mort, la liberté, l’isolement fondamental, l’absence de sens. Confrontés à ces questions, nous souffrons tous d’un certain niveau d’angoisse, nous partageons une souffrance commune, propre à la condition humaine, mais certains y sont exposés plus que d’autres. La littérature et la philosophie, qui se penchent depuis des millénaires sur ces grandes questions, peuvent nous aider, la thérapie aussi parfois, dans la mesure où elle repose sur l’empathie et sur une relation de communication authentique. Mais surtout ce qui nous vient de l’extérieur de nous-même et nous permet de sortir de nous-même -dit Irvin Yalom, psychiatre américain, auteur de Existential Psychotherapy, ouvrage publié en 1980 et traduit récemment en français. Il n’existe que deux manières de se confronter aux enjeux existentiels: l’angoisse (suscitée par la vérité) ou le déni, dilemme bien résumé par Cervantes qui fait dire à Don Quichotte : « Que préférez-vous, la folie du sage ou la sagesse du fou ? ». Le propre de la psychologie/la thérapie existentielle consiste à rejeter ce dilemme : la sagesse ne conduit pas à la folie, ni le déni à la santé mentale. Pour douloureuse qu’elle soit, la confrontation aux fondamentaux de l’existence se révèle être thérapeutique - explique-t-il dans l’Introduction. A l’ancienne formule (freudienne) : Pulsion > angoisse > mécanisme de défense se substitue l’équation : Conscience des enjeux ultimes > angoisse > mécanisme de défense. (Thérapie existentielle)
En se fixant pour cadre le point de vue de la psychologie existentielle, ce livre récent qui traite du harcèlement fusionnel explique pourquoi et comment l’adulte dépendant affectif cherche à dénier ses angoisses par un mécanisme de défense: la fusion avec autrui. Psychologue clinicien, l'auteur a été conduit par ses propres recherches cliniques à identifier les quatre grands comportements de l’adulte fusionnel: immaturité (l’immaturité psycho-affective, la personnalité dépendante), effacement (le refus de grandir, le rejet des caractéristiques de l’adulte), passivité (le refus de s’affirmer, la dévalorisation), dépendance (le refus d’agir, l’évitement de la décision, de l’action, l’auto-sabotage). A la différence du harcèlement moral, selon lequel s’affrontent un harceleur et une ou plusieurs victimes, le harcèlement fusionnel peut être défini comme un ensemble de comportements répétés d’agrippement, d’accaparement et de dépendance par lesquels un adulte force une autre personne à le prendre en charge, ce qui entraîne chez celle-ci une déstabilisation affective et psychologique. En guise de présentation, voici une sélection d’extraits dans ce document.
Plus d’informations sur Irvin Yalom et la psychologie /la thérapie existentielle dans cette interview de Psychologies, et sur le site de l’auteur, dont ses interviews.
Comme d'autres grands esprits, et dans une existence assez brève, Spinoza a trouvé du sens à la vie et a marqué l'histoire de la pensée. "Spinoza est un point crucial dans la philosophie moderne. L'alternative est: Spinoza ou pas de philosophie..."(Hegel).
"Je résolus de chercher s'il existait quelque objet qui fût un bien véritable, capable de se communiquer, et par quoi l'âme, renonçant à tout autre, pût être affectée uniquement, un bien dont la découverte et la possession eussent pour fruit une éternité de joie continue et souveraine." (Spinoza, Traité de la réforme de l'entendement).
Tout ce que nous faisons doit servir à l'avancement et à l'amélioration, dit Spinoza. L'âme, la raison, la connaissance, les émotions et le corps, tout doit nous amener vers la Joie. "Qui se connaît lui-même et connaît ses affections clairement et distinctement, est joyeux." (La note de CEFRO Emotions et connaissance (2014)
06/04/2018 | Lien permanent
Le goût du réel
02/02/2014 | Lien permanent | Commentaires (2)
Les thérapies brèves (I)
(Photo Nice -Ginkgo en novembre)
Ce sont les thérapies basées essentiellement sur le changement des comportements et des pensées. La deuxième vague, après le comportementalisme, comprend les Thérapies cognitives comportementales (TCC en français/CBT -Cognitive Behavioural Therapy) dont l’objectif est de « remplacer les idées négatives et les comportements inadaptés par des pensées et des réactions en adéquation avec la réalité ». Elles regroupent un ensemble de traitements des troubles tels les addictions, les psychoses, les dépressions, les troubles anxieux. Leur spécificité consiste à « s’attaquer aux difficultés du patient dans l’ici et maintenant par des exercices pratiques centrés sur les symptômes observables au travers du comportement » de celui-ci, et par l’intervention sur les processus mentaux (cognitifs) conscients ou non, considérés à l’origine des émotions et de leur désordre.
Ad Kerkhof est un psychologue clinicien danois qui a travaillé pendant plus de 30 ans dans la prévention du suicide. Il a remarqué qu’avant le passage à l’acte, les gens avaient vécu une période d’intense rumination à propos de l’avenir. Ils ont tous fait part de pensées qui les avaient submergés à un moment donné, et du ressenti que la seule issue qui leur apparaissait était de se supprimer, en supprimant ainsi le problème. Kerkhof a mis au point des techniques consistant à aider les personnes suicidaires à diminuer la rumination. A présent, il applique les mêmes méthodes aux personnes qui souffrent de certaines formes d’anxiété au quotidien.
Son livre Stop worrying: get your life back on track with CBT nous apprend à contrôler notre anxiété au quotidien, par des techniques efficaces. Il comprend un certain nombre d’exercices à faire chez soi, mais aussi bien en voiture, ou en faisant ses courses. Il nous arrive de ressentir de l’anxiété brusquement, sans en être vraiment conscients. En nous concentrant sur ce type d’exercices, nous verrons que la rumination des pensées négatives va diminuer. Les exercices ne vont pas résoudre nos problèmes, mais nous aurons appris à moins nous en soucier, ce qui nous laissera plus de temps pour essayer des solutions réalistes. Il s’agit d’une approche cognitive-comportementale pour résoudre l’anxiété. Le modèle (CBT) met l’accent sur le fait que les états émotionnels, la dépression, la colère et les tendances suicidaires sont souvent maintenus et renforcés par des habitudes de penser exagérées ou biaisées (par exemple, la généralisation, l’attention sélective, la dramatisation peuvent être combattues à l’aide de nombreuses techniques). De nos jours, il apparaît de plus en plus clairement que les personnes souhaitant bénéficier des approches cognitives -comportementales ne sont plus obligées de voir un thérapeute face à face, car d’autres moyens sont également efficaces: conseils et interventions en ligne, bibliothérapie, thérapie par e-mail ou chat.
L’habitude de s’inquiéter consiste en un flux souvent incontrôlable de pensées négatives récurrentes qui anticipent des événements négatifs, en se focalisant sur le contrôle ou l’évitement d’un danger futur ou d’un échec. L’inquiétude représente l’élément central dans l’anxiété généralisée, le stress post-traumatique et la dépression. L’inquiétude et la rumination, très proches mais distinctes, sont associées à des problèmes de santé du système cardiovasculaire, endocrinien ou immunitaire. Il existe, d’ailleurs, une abondante littérature de spécialité qui traite du neuroticisme incluant typiquement des symptômes d’inquiétude, de hantises et de phobies. L’inquiétude excessive peut favoriser l’anxiété et la dépression, mais elle peut aussi être un effet de l’anxiété et de la dépression. Même les formes légères d’inquiétude excessives peuvent être à l’origine du stress et de l’insomnie.
Une intervention d’auto-assistance (self-help intervention) est un traitement psychologique structuré qu’une personne peut suivre chez soi, de manière autonome. On trouve des interventions d’auto-assistance sur CD-Rom, en vidéo ou en DVD, à travers des programmes télévisés ou sur internet. Elles s’adressent à une population qui ne souhaite pas, ou pas encore, rencontrer un psychothérapeute.
Dans ce livre, l’auteur combine la démarche cognitive-comportementale avec l’approche positive de résolution de problèmes et avec quelques éléments de la méthode de la pleine conscience. L’objectif de ces exercices est que les sujets apprennent à:
- reprendre le contrôle de leurs pensées
- évaluer lucidement les menaces futures
- identifier et combattre les erreurs communes de raisonnement
- corriger les croyances erronées concernant l’inquiétude
- utiliser d’autres moyens pour gérer les menaces futures
- gérer l’incertitude
- faire face aux connaissances au lieu de les éviter
- utiliser la distraction, la relaxation, l’écriture, l’imagination, l’humour comme des mécanismes de gestion de l’anxiété
Les exercices choisis ou développés dans cette intervention de réduction de l’inquiétude portent, entre autres, sur :
- l’inquiétude différée
- la relaxation musculaire
- les exercices d’écriture
- la surveillance des inquiétudes spécifiques
- les formes positives d’inquiétude
- les exercices de méditation et de pleine conscience
- le soutien d’un ami pour communiquer au sujet de l’inquiétude
08/12/2016 | Lien permanent